Prix de l’Institut des hautes études de défense nationale 2023
Agathe Couderc et Maxime Launay, doctorante et doctorant en histoire à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université, ont été récompensés pour leurs thèses par l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN).
Les prix scientifiques de l’Institut des hautes études de défense nationale ont été décernés mardi 16 mai 2023 à 18h00 au salon des Maréchaux de l'École militaire de Paris. Ils ont été délivrés par M. le préfet Denis Conus, directeur-adjoint de l'Institut des hautes études de défense nationale, au nom du général de corps d’armée Benoît Durieux, directeur de l’IHEDN.
Maxime Launay, lauréat du prix "spécial"
Intitulé : "Une armée nouvelle ? La gauche et l’armée française (1968-1985). Antimilitarisme, libertés publiques et défense nationale"
Direction : Olivier Dard
Unité de recherche associée : Sorbonne - Identités, relations internationales et civilisations de l’Europe (SIRICE - UMR 8138)
Discipline principale : Histoire contemporaine
Thématiques : Histoire politique et militaire de la France pendant la Guerre froide, histoire de l'État, histoire des relations politico-militaires et des relations armées-société
Son parcours universitaire
Pendant la réalisation de sa thèse, Maxime Launay a été doctorant contractuel chargé d’enseignement, puis attaché temporaire d'enseignement et de recherche à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université et à l'Université d'Orléans, où il a enseigné l'histoire contemporaine de la France et de l'Europe, de la licence au master, en passant par la préparation aux concours de l'enseignement. Membre du comité de rédaction de la revue Parlement[s]. Revue d'histoire politique, il coordonne l'axe "Europe politique" de l'Encyclopédie d'histoire numérique de l'Europe (EHNE).
Résumé de la thèse
Comment se fait-il que la relation entre la gauche et l’armée, longtemps antagoniste ou du moins contrariée, ait pu évoluer entre 1968 et 1985 au point de s’institutionnaliser et de contribuer au consensus sur la défense nationale ? Trois notions centrales, l’une relative au rejet du rôle dévolu à l’institution militaire (l’antimilitarisme), l’autre à la place prévue pour les droits et libertés garantis par l’État pour l’état militaire (les libertés publiques), la dernière dédiée aux principes d’une politique militaire au nom des intérêts de la France (la défense nationale), forment le fil conducteur retenu pour cette thèse.
L’armée, sortie brisée de la guerre d’Algérie, prise ensuite dans les contestations des « années 1968 », traverse une nouvelle crise au milieu des années 1970. Pourtant, ni elle ni la gauche ne sont des blocs monolithiques : de multiples acteurs, au gré des rapports de force, contribuent à des aggiornamenti croisés. Tandis que la gauche de gouvernement se rallie à la dissuasion nucléaire, accède au pouvoir et s’accommode des institutions de la Ve République, les militaires repensent leur rôle dans la société, revoient leur rapport à la discipline, et acceptent avec loyalisme, malgré la défiance initiale, l’arrivée des socialistes au pouvoir. Si l’heure est à la continuité en 1981, cette rencontre conduit à une désidéologisation et à une dépolitisation durable des questions militaires et de défense dans le débat public.
Fondée sur un corpus d’archives militaires et policières, des institutions gouvernementales et parlementaires, des organisations de la gauche, et d’entretiens oraux, cette recherche entend montrer que l’histoire de la gauche française est indissociable de celle de l’armée.
Agathe Couderc, lauréate du premier prix dans la catégorie "thèses"
Intitulé : "Sous le sceau du secret. Les coopérations internationales des Chiffres britannique et français, militaires et navals pendant la Première Guerre mondiale"
Direction : Olivier Forcade
Unité de recherche associée : Sorbonne - Identités, relations internationales et civilisations de l'Europe (SIRICE - UMR 8138)
Discipline principale : Histoire des relations internationales et de l’Europe (Histoire contemporaine)
Thématiques : Renseignement, Première Guerre mondiale, coalitions, Entente cordiale, cryptologie
Son parcours universitaire
Agrégée d’histoire en 2017, Agathe Couderc est docteure en histoire des relations internationales et de l’Europe et a soutenu sa thèse intitulée "Sous le sceau du secret. Les coopérations internationales des Chiffres britannique et français, militaires et navals pendant la Première Guerre mondiale" en décembre 2022. Elle est également titulaire d’un master d’histoire, parcours recherche, dans la spécialité "Armées, Guerres et Sécurité dans les sociétés de l’Antiquité à nos jours", obtenu à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université en 2014. Doctorante contractuelle de l’école doctorale Histoire moderne et contemporaine (ED 188), puis attachée temporaire d'enseignement et de recherche en histoire contemporaine, elle est chargée de travaux dirigés en licence pour l’UFR d’Histoire depuis 2018. Menant ses recherches doctorales au sein de l'unité mixte de recherche Sorbonne - Identités, relations internationales et civilisations de l'Europe (SIRICE - UMR 8138), elle s’intéresse plus particulièrement à l’évolution du renseignement technique pendant la première moitié du XXe siècle, aux coopérations secrètes au sein d’une alliance, ainsi qu’à la construction et à l’échange de savoirs et de savoir-faire sensibles, en temps de guerre comme en temps de paix.
Résumé de la thèse
Pendant la Première Guerre mondiale et à la faveur de l’évolution des télécommunications de la fin du XIXe siècle, une nouvelle branche du renseignement émerge : le renseignement technique, fondé sur les interceptions de messages transmis par les ondes. À la faveur de ces progrès techniques, la cryptologie (ou science des écritures secrètes) militaire connaît un développement accéléré pendant la Grande Guerre, qui se traduit, au sein des forces armées des belligérants, par la création ou l’élargissement de services dits "du Chiffre", spécialisés dans la protection des communications nationales et dans l’attaque des messages codés étrangers.
Comparer les Chiffres des armées et marines françaises et britanniques, en croisant dans des volumes équivalents les archives de ces deux États, met en lumière plusieurs similitudes dans l’instauration de ces services, notamment dans le recrutement d’un personnel soumis au secret. Malgré cet impératif du secret, une coopération secrète, interarmes et interalliée, se noue entre les Chiffres de l’Entente cordiale. Cette alliance comprend la construction de codes et systèmes de chiffrement secrets communs, et le partage d’informations issues du renseignement technique.
En suivant les Chiffres de l’Entente de l’avant-guerre jusqu’à l’après-guerre et la pérennisation de ces services spéciaux, cette thèse souligne l’importance de la cryptologie pour la coopération secrète des Français, des Britanniques et de leurs autres alliés, et propose ainsi une histoire de l’institutionnalisation du secret au début du XXe siècle.
L’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN)
Établissement public à dimension interministérielle, placé sous la tutelle de la Première ministre, l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) a pour mission de promouvoir la culture de défense, de participer au renforcement de la cohésion nationale, et de contribuer au développement d’une réflexion stratégique portant sur les enjeux de défense et de sécurité.
Depuis 1998, les prix scientifiques de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) ont pour but de mettre en valeur la recherche consacrée notamment aux questions de défense, de sécurité, de relations internationales, de politique étrangère, d’armement et économie de défense. Ils récompensent chaque année des chercheurs et chercheuses en master 2 recherche et en doctorat, dont les travaux, soutenus dans l’année, font progresser les connaissances dans le domaine des sciences humaines et sociales.
Photo de gauche
De gauche à droite : Maxime Launay, Agathe Couderc, Claire Caniaux (lauréate du premier prix dans la catégorie "mémoires de master 2 recherche" pour son mémoire "Viser la lune. Les ambitions spatiales de la Turquie" à l'INALCO, dirigé par Alexandre Toumarkine)
Photo de droite
De gauche à droite : Olivier Forcade (professeur d'histoire contemporaine des relations internationales à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université), Bertrand Couderc (père d'Agathe Couderc), Agathe Couderc, Gautier Sénéchal (compagnon d'Agathe Couderc)
De gauche à droite : membre du jury de l'IHEDN, Aurélie Vittot (docteure à l’IHEDN), Maxime Launay, Agathe Couderc, M. le préfet Denis Conus, directeur-adjoint de l'Institut des hautes études de défense nationale, Claire Caniaux (lauréate du premier prix dans la catégorie "mémoires de master 2 recherche" pour son mémoire "Viser la lune. Les ambitions spatiales de la Turquie" à l'INALCO, dirigé par Alexandre Toumarkine), Guillaume Lasconjarias (docteur en histoire et directeur des études et de la recherche de l’IHEDN)