Conférence de Ninon Chavoz : "Les Encyclopédistes hors norme : fictionnaires et fausses pistes en francophonie"

Le séminaire « Identités plastiques » touche aux questions d'hybridité, de bizarrerie par rapport à une norme (queerness), de frontières flottantes ou poreuses, telles qu'elles se font jour en littérature et dans les arts. Mettant en jeu différents champs de recherche, comme les études de genre ou l’écopoétique, il interroge, au fil des interventions, les catégories identitaires destinées à classer le monde, les êtres, les langues et les disciplines académiques qui les appréhendent.

Longtemps, l’encyclopédie a inspiré confiance : elle introduisait un ordre bienvenu dans la prolifération du monde, elle pensait et elle classait. Pourtant, son heure de gloire semble aujourd’hui révolue. Condamnée à l’incomplétude, elle est devenue le domaine des amateurs anonymes et échappe au format rassurant du livre pour essaimer sur la toile. Ninon Chavoz avance que ce basculement d’un modèle de savoir vulgarisé – des riches volumes vendus porte à porte au portail de Wikipédia consulté en quelques clics – fut préparé de longue date par les variations qu’imposèrent artistes et écrivains aux planches et aux volumes encyclopédiques, dont ils mirent en évidence la plasticité, l’hybridité et l’indiscipline créatrice.

Dans les travaux que Ninon Chavoz a menés au cours des dernières années (Éloge des ratés, 2020 ; Inventorier l’Afrique, 2021), elle s’est intéressée au rôle joué dans ce changement par les créateurs francophones venus d’Afrique, des Antilles, mais aussi du Canada, de Suisse ou de Chine. Elle s’attache à y démontrer que le dévoiement du modèle encyclopédique constituait un fil rouge courant entre des aires francophones culturellement, historiquement et géographiquement distinctes.

En dépit de la variété des portraits encyclopédiques ainsi obtenus, il restait un point aveugle dans cette réflexion : dans les corpus traités, l'encyclopédisme demeurait exclusivement le fait d’auteurs masculins. Fallait-il se résigner à un tel constat et considérer la démesure encyclopédique comme la manifestation d’une tentation masculine ? Pour répondre à cette question, la conférence annoncée ici s’attache notamment à l’oeuvre de l’auteure acadienne France Daigle et singulièrement au plus innovant de ses romans Pour sûr (2011), que Lise Gauvin a pu comparer à La Vie : mode d’emploi de Georges Perec ou encore à Marelle de Julio Cortazar.

Organisation

• Irène Gayraud, maîtresse de conférences en littérature comparée à la Faculté des Lettres, Centre de Recherche en Littérature Comparée
• Danielle Perrot-Corpet, maîtresse de conférences en littérature générale et comparée à la Faculté des Lettres, Centre de Recherche en Littérature Comparée
• Judith Sarfati Lanter, maîtresse de conférences en littérature comparée à la Faculté des Lettres, Centre de Recherche en Littérature Comparée

Intervenantes et intervenants

• Ninon Chavoz, maîtresse de conférences en littératures francophones, Université de Strasbourg